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13 juin 2008 5 13 /06 /juin /2008 23:57

Supergrass, le 12 juin 2008...
Malgré un album un peu décevant (voir ici),
toujours aussi généreux et enthousiastes sur scène...



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5 juin 2008 4 05 /06 /juin /2008 23:04


Face A (Angry Side)

Ça commence avec ce mec devant moi qui raconte qu’il est tombé sur Ghosts of Mars à la télé, sur une chaîne de la TNT. Il a trouvé ça pourri. Le rouquin au tee-shirt Che et la petite gothique qui l’accompagnent surenchérissent. "J’hallucinais en lisant le programme télé, ils écrivaient que c’était vachement bien. N’importe quoi !", dit-elle. "De toutes façons, les effets spéciaux, ils sont toujours nases chez Carpenter", ajoute l'apprenti guerillero aux longs cheveux gras plaqués qui, lui, connaît au moins l’illustre cinéaste. C’est déjà ça. Sauf que cette assertion saugrenue qui vient de franchir ses lèvres prouve qu’il n’a jamais vu The Thing ou Prince des ténèbres. Je pourrais lui rappeler tout ça. Mais j’ai juste envie de m’éloigner d’eux, de ne pas subir ces propos ineptes de spectateurs pour qui tout se vaut, qui ne trouvent rien d’autre à reprocher au film que ses effets spéciaux ratés et ses personnages archétypaux (La belle affaire ! Il faudrait leur expliquer ce qu’est la série B).
Mais on piétine. Non, je ne peux pas m’éloigner. À côté, des ados s’inquiètent de savoir qui a acheté les alcools forts pour l’after. Et se mettent à engueuler celui qui va les accueillir chez lui après le concert car il n’a acheté que des bières. "Nan, mais j’avais pas compris… C’est bon, y’a un rebeu en bas de chez moi". Un épicier, veut-il dire sans doute…
On est serrés. Il est 18 heures passées. On va rentrer dans le Palais Omnisports de Paris Bercy. On n’a pas eu de place en fosse. Les places assises sont non-numérotées. Et personne n’a envie d’être expédié dans les lointains gradins qui font face à la scène…
C’est marrant, ici ce n’est pas le même genre de spectateurs que ceux que l'on croise d’habitude aux concerts parisiens. Leurs tee-shirts disent un peu qui ils sont, ce qu’ils écoutent… Guns & Roses, Queens Of The Stone Age… Entre autres… Pas mal de métalleux… Le revival rock et sa panoplie fashion ne sont pas passés par leur garde-robe. Tout simplement parce que pour eux, sans doute, le rock n’est pas une mode, n’est jamais mort, n’a jamais eu à renaître de ses hypothétiques cendres. Dreadlocks, pantalons treillis, bermudas, grosses baskets, crânes rasés,
piercings et tatouages ethniques sur corps musculeux. Pas le faux-pli d’un jean slim à l’horizon.
Je suis l’un des plus vieux. La plupart ici ont 25/30 ans. Les plus jeunes, qui sont là eux aussi, n’étaient pas nés quand résonnèrent pour la première fois sur les radios – avant les interdictions post 11/09 – les bombes fusion du quatuor Angeleno. À l’instar de Nirvana (excusé), pas besoin de nouveaux albums, nulle actualité – sinon celle de cette reformation tant espérée – pour que le groupe renouvelle son public. Ou alors c’est qu’il faut remercier les grands frères et les grandes sœurs, je ne sais pas. Ce qui est sûr, c’est que pour un groupe prônant la révolution et entrant en scène quelques heures plus tard au son de L’Internationale il y a beaucoup trop de tee-shirts impersonnels siglés Rage Against the Machine. On se croirait à un concert de Muse tant la proportion de moutons est impressionnante. Oui, vraiment, on devrait, de manière générale, interdire le port des vêtements à l’effigie des groupes à l'affiche, barrer par exemple l’entrée d’un concert de RATM à quiconque porte un de leurs tee-shirts... Tu y étais en 1992 ? T’as fait la tournée Evil Empire ? On s’en fout. Si t'es là, on s'en doute que tu les aimes bien. On n’est pas là pour mesurer qui est le plus gros fan, qui a "headbangué" le premier et qui c’est qu’a la plus grosse. Et puis surtout évite un peu de porter le tee-shirt de la tournée 2008, que tu viens d'acheter à l'instant, parce que, là, tu passes juste pour un opportuniste...
Oui, je suis de mauvaise humeur. Mes amis sont loin derrière, arrivés tard. Pas sûr qu’on se retrouve une fois à l’intérieur.
Une grosse heure plus tard, violence. Violence des sifflets à l’encontre de Saul Williams, préposé à la première partie, sacrifié, envoyé au feu en victime expiatoire. Moi aussi je me suis ennuyé, ces rythmiques indus’ étaient parfois pénibles et aucune mélodie ne parvenaient à s’y accrocher. Mais tout de même Saul Williams, ce n’est pas rien, ce n’est pas le premier venu. Sans doute agace-t-il avec sa sa coiffe indienne (évoquant George Clinton ?), sa morgue et son funk bruitiste et robotique desservi par une sonorisation plus que limite. C’est fou comme l’obscurité et la foule semblent tout autoriser. Derrière moi, le gentil garçon venu avec maman se lâche à grand renfort de "Rentre chez toi !" et de "Ta gueule !". Pauvre type. Si au moins tu avais trouvé des tournures un peu plus piquantes. Si jeune et déjà si intolérant.
Je suis d’humeur à passer en mode vieux con. À un moment, je me retourne, le fixe droit dans les yeux. Ça marche : je ne l’entendrai plus. Le problème, c’est qu’ils sont quelques milliers supplémentaires à huer l’ex-slammeur qui ne sait plus trop aujourd'hui s’il est Prince, TV on the Radio ou Nine Inch Nails. Ils sont chauffés à bloc, ils sont là depuis trop longtemps, pressés dans la fosse les uns contre les autres, attendant d’en découdre et ne se rendant pas compte que ce sont bien leurs idoles qui l'ont invité (ils lui dédieront d'ailleurs Sleep Now in the Fire une fois sur scène). Évidemment, avec ma voisine d’un soir, on applaudit encore plus fort entre les morceaux, atterrés par la haine qui sourd d’une bonne partie du public. À ce moment-là, je me demande vraiment si j’aime RATM pour les mêmes raisons que ces gens-là...

 

Face B (Happy Side)

Voir RATM donc... C’est le lot de beaucoup d’entre nous – comme pour les Stooges ou les Pixies – que de découvrir certains groupes tant chéris au gré de reformations plus ou moins motivées par la sincérité. Pourtant, RATM sur scène, c’est "énorme", comme on dit aujourd’hui. Voir tout Bercy se lever comme un seul homme dès que les lumières s’éteignent ; nous voir, toutes et tous, lever le poing, comme à la Fête de l’Huma – au son de L’Internationale donc – c’est plutôt pas mal pour commencer. Ça ferait presque chaud au cœur (si l’on n’avait pas encore en tête les stridentes réminiscences de ces sifflets voulant congédier Saul Williams). En même temps, L’Internationale, c’est un peu facile, non ? Tellement évident. Ce chant résonne comme un signe, comme un logo, tel cette étoile rouge en fond de scène, tel ce fameux portrait de Che Guevara sur l’ampli de Tom Morello. Passons… Oui, arrête de pinailler, Ska : hier soir – toi le premier – nous avions tous envie d’y croire…
Ok. Dont acte. Même que la photo, je vais la photoshopé en rouge, histoire de bien être dans le ton.

Je ne sais pas ce qui a poussé RATM à se reformer, mais force est de constater que l’énergie est intacte, quasi-décuplée. Tout Bercy "jumpe" à l’unisson, de la fosse aux balcons, de la scène aux gradins. Les chansons-slogans, les harangues de Zack de la Rocha s’enchaînent ne laissant que peu de répit à nos jambes (mention passable à Renegades of Funk, ventre mou d’un set presque parfait livré par un quatuor qui jamais ne débandera).
Parfois, je quitte des yeux la scène pour observer la fosse. Durant Guerilla Radio, sur Know Your Ennemy, il n’y a pas un mètre carré qui ne se soit transformé en un terrain mouvant, instable, bondissant, exultant… Pour une fois, je ne suis pas mécontent d’être au-dessus de la mêlée. Sur scène, en tout cas, les années qui sont passées depuis le split ne se voient pas : Tom Morello part en vrille, se débranche involontairement à deux reprises, monte sur les retours, virevolte sur lui-même, tout aussi électrique que cet instrument qu’il malmène avec délectation, dont il sort les sonorités les plus improbables, scratchant ses six cordes comme personne, jouant sans relâche avec ses micros, ses pédales d’effets. Lui que l’on avait quitté avec un beau disque solo, acoustique et engagé
(The Nightwatchman), payant son dû au folk et à Springsteen, on le retrouve dans son rôle de dynamiteur officiel et ça fait plus que plaisir.
Quand Tom Morello et Tim Commerford, yeux dans les yeux, guitare et basse à l’unisson, entament l’intro de Bombtrack, je pense à notre répétition de la veille aux studios Basement, à Mr J perdu dans un recoin de la salle et que je ne retrouverai qu’à la sortie… Quand résonnent les derniers accords de Killing in the Name et que s’étouffe dans un ultime cri rageur la colère de Zack, je me souviens que la dernière fois que j’ai entendu ce morceau, c’était au Bataclan
il y a quelques semaines, lors d’une "Sabotage Rock Party" mémorable, et que je m’étais pris pendant le pogo une mandale pas méchante et évidemment involontaire. Hier soir, la baffe fut virtuelle mais autrement cinglante.
Au bout d’une heure vingt seulement, les quatre torpilleurs soniques quittent la scène pour la deuxième et dernière fois. Un regret tout de même : qu’aucune reprise n’ait été jouée ce soir. Pas de Kick Out the Jams, pas de Ghost of Tom Joad, pas de Maggie’s Farm ni de Street Fighting Man, fleurons d’un ultime album (de reprises) paru juste après cette séparation qui n'est plus qu'un mauvais souvenir. Certains de ces morceaux, on n’aura jamais eu la chance de les entendre sur scène. À moins qu’à Saint-Cloud, le 20 août…

 

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30 mai 2008 5 30 /05 /mai /2008 18:02
Ben oui, c'est ce que Jem a écrit sur le LP acheté à la sortie du Bataclan (voir ci-contre).
Jem, c'est le bassiste de The Ettes, le seul garçon du trio qui jouait avant The Black Keys mardi soir au Bataclan. Et des premières parties comme ça, eh bien, ça fait plaisir. Déboulant sur scène après le français Don Cavalli et son très digne blues rock, il fallait bien l'énergie punk de ces trois-là pour que j'oublie la nuit pas reposante passée, la veille, dans le train me ramenant de Cannes...
The Ettes, donc. Un groupe balançant des petites bombes rock jouées pied au plancher et dépassant rarement les deux minutes. Une énergie rappelant Gossip (sans la soul) mais aussi The Yeah Yeah Yeahs, un autre excellent souvenir de première partie, quand j'avais découvert, estomaqué, le groupe de Karen O en première partie du Jon Spencer Blues Explosion... The Ettes... Sa très énergique batteuse à la coupe afro, sa basse saturée doublant la guitare de la chanteuse Coco. Je ne suis pas sûr que The Ettes deviennent "the next big thing" (peu probable même), mais, là, c'était pile ce qu'il me fallait. Le LP, posé sur la platine chaque matin depuis mercredi, confirme la bonne impression.




Et The Black Keys, alors ? Fantastiques à nouveau, d'une puissance phénoménale, ouvrant avec Thickfreakness, glissant quelques nouveaux morceaux dans une setlist constituée de classiques déjà imparables (10 AM Automatic, Your Touch, Girl is on My Mind). À quelques mètres en contrebas de Patrick Carney, j'ai surtout appris, mardi, tout le vocabulaire de la batterie. Je l'ai plaint aussi tant il avait l'air d'en baver avec ses problèmes de ventilateur, sa pénurie temporaire de bouteilles d'eau. Il n'avait pas l'air en forme, un rien grognon. Pourtant, il trouvait à l'entame de chaque nouveau morceau les ressources physiques que l'on croyait définitivement épuisées. J'ai vu surtout qu'il ne faisait pas semblant, quittant la scène exténué sans demander son reste. Sans doute n'était-ce pas pour lui un bon soir... Mais surfant sur les riffs de Dan Auerbach, nous n'y avons vu quasiment que du feu...


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16 mai 2008 5 16 /05 /mai /2008 22:33

C'est plutôt étrange cette esthétique commune aux pochettes de ces deux disques achetés l'autre soir... Un hasard ? Pas sûr...

Pourquoi donc l'homme s'enfonce-t-il dans l'eau ? Quel lourd secret croit-il noyer ? Connaissait-il la fille gisant à terre près du casino ? Peut-être l'a-t-il tuée ? Et, sur l'autre rive, derrière les collines aux reflets orangés, la femme fatale au chapeau sait-elle déjà qu'il ne viendra plus ?



























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14 mai 2008 3 14 /05 /mai /2008 20:13


Le lieu portait le nom d’un mauvais album de Madonna. L’Erotika était logiquement situé à Pigalle, pas loin de l’Elysée Montmartre, de la Cigale, entre phosphorescents sex shops et minables échoppes. Déjà touristique, le quartier, sous les néons fluos. Mais bien moins qu’aujourd’hui, aseptisé, safe, nettoyé des filles et des travestis qui alors y faisaient tache…
Thomas, le chanteur de ce groupe de rock alternatif que tu aimais bien, venait de lancer un nouveau projet. Ce groupe, dont l’album avait été produit par le guitariste de FFF, devait jouer ce samedi-là à l’Erotika. Il s’y produisait assez régulièrement, avais-tu cru comprendre. Dans la semaine, parce que tu avais entendu parler d’invitations à récupérer sur radio 102.3, tu étais allé, un midi, chercher deux places pour le concert.


Ce samedi-là, donc, vous débarquiez à l’Erotika. Vous ne vous étiez pas renseignés. Vous ne saviez pas qu’il ne s’agissait pas vraiment d’une salle de concert. Il avait beau être près de minuit, la salle était vide. Les mecs en sapes chics et les nanas apprêtées qui arrivaient peu à peu ne laissaient planer aucune ambiguïté sur la nature du lieu. De toutes façons, peu de gens, à cette heure, étaient là pour le groupe. D'ailleurs, il était patent qu'il n'allait pas jouer tout suite...
Cela faisait un moment que tu n’étais pas rentré dans une discothèque. Une discothèque, vous auriez dû vous en douter. La musique, crois-tu te souvenir, était médiocre. Boire, il n’y avait que ça à faire. Les consos s'additionnaient encore en francs. Les gens dansaient mollement. L’ennui infusait lentement.

Puis vint l’heure du concert. Son dernier show. Mais, ça, tu ne le savais pas encore.
Sa prestation, tu ne t’en rappelles pas vraiment bien. Le groupe, livrant avec fougue son funk-rock en français, s’amusait, c'est sûr. Devant un public majoritairement indifférent, principalement impatient que les instruments dégagent et que le dancefloor s’électrise. Tu sais pourtant, sitôt les amplis éteints, que vous êtes partis. A l’époque, tu aimais bien moins danser qu’aujourd’hui.


Le surlendemain, un entrefilet dans un journal.
Le chanteur était tombé du toit.
Après le concert, il avait entrepris l’escalade de la façade de l’immeuble. Perché une fois de trop.
Et pendant que tu rentrais, que tu te couchais, que tu t’endormais, à seulement quelques centaines de mètres de toi, il avait glissé.

On l’a un peu oublié aujourd’hui. Les disques de ses deux groupes ne traînent sans doute même plus dans les bacs à soldes. Toi, tu aimes bien, pourtant, les réécouter parfois. Des échos, des larsens d'adolescence...
C’est en recherchant il y a peu les accords de La mouche, chanson qu’il avait reprise en guise de clin d’œil avec son premier groupe - le plus connu - que tu avais incidemment repensé à lui, à cette soirée parisienne lointaine et floue, à cette énième tragédie rock à la con…

 

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6 mai 2008 2 06 /05 /mai /2008 19:26
Est-ce que ça vaut vraiment le coup de parler ici du nouveau clip de Justice ? En parler, c'est alimenter la polémique, celle-là même, recherchée, pour laquelle il a été balancé il y a quelques jours sur Internet.
Pourtant, oui, ça vaut le coup. Parce qu'on est le 6 mai 2008. Parce que l'irresponsabilité et l'immaturité politique, ça va bien ! Parce que les fictions qui viennent légitimer les discours les plus vils me foutent en rogne. Et parce que le morceau - excellent - ne méritait pas pareil traitement.


Ce clip, donc, est signé Romain Gavras, pillier du collectif Kourtrajmé. Pour aller vite, on pourrait dire que c'est un peu le refoulé de La Haine (d'ailleurs, rappelons que Mathieu Kassovitz et Vincent Cassel comptent parmi les parrains de ce collectif féru de cinéma tape-à-l'oeil et de culture hip hop). Il met en scène une bande de jeunes venant semer la zone dans Paris. Des jeunes de quartiers "sensibles" forcément, des noirs et des arabes bien sûr (!). Mais tu vois, il y a de la distanciation, les jeunes, là, ils viennent dans des cuirs griffés Justice. On donne à voir au spectateur ce qu'il a envie de voir, on le confronte aux représentations qu'il se fait du monde, de la banlieue. Et puis surtout, tu vois, il y a le message trop rebelle à la fin, quand la bande, jusqu'alors filmée en caméra subjective, se retourne contre le journaliste, le roue de coup et l'invective pour dénoncer la propension des médias à filmer la violence. Trop forte, la dénonciation, les mecs ! Belle hypocrisie, surtout. C'est bien, finalement, de l'avouer par inadvertance dans votre clip, cette fascination pour les images de chaos que vous partagez avec votre double de fiction planqué derrière la caméra. Comme une prise de conscience soudaine, une belle manière de se tirer une balle dans le pied... Le prétexte éculé de la critique des médias (qui fleure bon la démagogie rance du "tous pourris") servait déjà à Ruggero Deodato pour justifier, il y a près de trente ans, les atrocités filmées dans son impressionnant Cannibal Holocaust (plus récemment, on pensera aussi à la posture du complaisant donneur de leçons Michael Haneke dans Funny Games).
Cette posture qui, au final, sert à se dédouaner à peu de frais rend encore plus antipathique ce clip, même pas fichu d'assumer jusqu'au bout ses penchants punks et nihilistes, même pas foutu, surtout, de suivre jusqu'au bout ses personnages... Ouais, tu vois, nous, en fait, on cautionne pas, hein ! On met en garde. C'est notre rôle d'artistes, tu vois... Très bien, mais, vous savez, c'est pas super fin votre discours, les gars... Certains pourraient mal l'interpréter... Et puis, en même temps, on se souvient tout d'un coup que les deux musiciens de Justice viennent de Versailles (en banlieue, non ?), qu'on les écoute sans doute bien peu dans ce qu'ils imaginent être "la banlieue" et qu'ils sont un peu en manque de "street credibility". Faut les comprendre, les pauvres... D.A.N.C.E., le tube bubblegum tout gentil, tout rose, leur colle tellement aux semelles qu'ils lui font même un sort (à 4' 53) dans ce nouveau clip révélant enfin leur côté sombre...

Par ailleurs, plus que La Haine (qu'on l'aime ou pas, le film était novateur et porteur d'un discours respectable), le clip de Romain Gavras me paraît viser un diptyque essentiel du cinéma américain des années 70 : Assaut de John Carpenter et Les Guerriers de la nuit de Walter Hill. Certains morceaux de Justice évoquait d'ailleurs déjà les compositions minimalistes de John Carpenter pour ses films. The Warriors et Assault on Precinct 13, donc, se répondaient : l'un statique (prototype du film de siège), l'autre en mouvement constant (et préfigurant les jeux de plateaux). Quand l'un proposait une variation, sur le mode Rio Bravo, du film fondateur de l'horreur contemporaine (La nuit des morts-vivants de George A. Romero), l'autre inventait le jeu vidéo transposé au cinéma alors que les consoles et les ordinateurs personnels n'en étaient pour le grand public qu'à leurs balbutiements. Dans ces deux films, la stylisation extrême mettait à distance le réalisme et la fascination des réalisateurs pour les phénomènes de bandes urbaines. Juste retour de choses, Carpenter se souviendra d'ailleurs très bien du film de Walter Hill et de sa déambulation d'un quartier à l'autre, des affontements contre différents adversaires (une nouvelle bande correspondant à chaque nouvel espace), quand il tournera peu de temps après New York 1997...




Cette distance, cette stylisation, ce sens de la mise en scène venant sublimer de pauvres arguments de série B, c'est bien ce qui manque au nouveau clip de Justice. Cette vidéo, on n'a vraiment pas envie de  la regarder avec n'importe qui tant elle vient - au corps défendant de ses auteurs, j'en suis sûr - alimenter tous ces discours abjects que l'on nous sert depuis trop longtemps sur l'insécurité.

Problème presque similaire, finalement, pour un autre clip récent signé Romain Gavras, misant déjà tout - et trop - sur le spectaculaire, l'effet pour l'effet...


Signatune
, pour DJ Medhi, avait, c'est certain, de l'allure (comme le clip de Stress). Il était même assez drôle. Mais il y avait déjà là-dedans un truc embarrassant, ce regard condescendant de celui qui vient filmer les trognes, les tronches des non-professionnels (ici des adeptes du tuning), pour que le téléspectateur se marre à peu de frais. On imagine les séances de castings de Signatune et de Stress et on a juste envie de vomir face à tant de cynisme. Une sorte de syndrome Strip-Tease (cette série de documentaires belges souvent peu respectueux de ceux qu'ils filment) appliqué au clip musical...

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28 avril 2008 1 28 /04 /avril /2008 22:57

Il est des disques dont l'importance manifeste nous donne envie de rompre avec nos mornes habitudes de consommation discophile, habitudes balançant entre achats hebdomadaires et téléchargements aléatoires.
Il est des disques dont le relief, soudain, voue les autres à l'anecdotique. Des disques, surtout, que l'on a envie d'écouter autrement.
Il fallait marquer le coup, rompre avec les habitudes, avec ses petites virées d'après boulot à la Fn*c qui se soldent souvent par l'achat d'un (ou plusieurs) cd.
Bien sûr, le troisième album de Portishead, je n'ai pas attendu aujourd'hui pour l'écouter. Nous sommes nombreux à l'avoir fait bien avant sa sortie. Grâce ou à cause d'Internet, on l'écoute depuis un mois et on est subjugué. Mais ces fichiers mp3 atterris sur un cd lambda désincarnaient l'album le plus organique et le plus entêtant de ce début d'année. Du coup, Third, je ne l'ai pas tant écouté que ça. Suffisamment, toutefois, pour commencer à mesurer l'ampleur et la richesse de l'objet. Mais j'attendais sa sortie pour le laisser m'ensorceler.
Soyons honnête, j'achète très rarement un album que j'ai récupéré avant sa mise en vente. C'est le drame ordinaire qui fait que je n'ai qu'une pâle copie du dernier Black Keys, de Pocket Revolution de dEUS ou de White Chalk de PJ Harvey. Tant de disques attendus avec ferveur, signés par des artistes invariablement chéris, mais que le hasard ou une bonne âme ont mis entre mes mains avant leur parution, brisant ainsi la poussée de désir liée à une date de sortie affichée en point de mire mental (notion aujourd'hui vouée à l'obsolescence tant pour les disques que pour certains films). Bref, une fois gravé, il m'est difficile, face à la tripotée de disques me faisant de l'oeil, de céder pour un objet que j'ai déjà, certes dans une version affadie, chez moi...
Mais pour Third, il ne pouvait en aller qu'autrement. Sentiment évident - conforté tandis que résonne The Rip dans les enceintes - que ce disque venait interrompre quelque chose, arrêter le temps, remettre quelques compteurs à zéro, casser le flux de mes enthousiasmes, de mes déceptions et de mes passades d'un jour ou d'une semaine. Ce disque était ailleurs. Ce disque était d'ailleurs.
Third aurait pu n'être qu'un cd de plus. D'ailleurs, j'aime bien Portishead, mais mes vraies affections se sont toujours portées sur d'autres groupes, sur d'autres disques. Le troisième album de Portishead ? Mouais, faut voir... Eh bien, désormais, c'est tout vu.
Third, donc, devait d'emblée trouver sa place ailleurs. Pas sur ces étagères, pas dans ces tiroirs, pas dans ces tours. L'écouter se mériterait. Il faudrait se lever pour profiter du disque. Changer de face. Changer de disque. Comme avant. Cet album ne souffrirait pas d'être écouté par inadvertance. Il décrasserait mes oreilles, rejoindrait quelques autres merveilles analogiques dont le poids fera pester quiconque participera à mes futurs déménagements.
C'est pourquoi quand j'ai vu le 33 tours de Third, le récupérer sous cette forme s'imposa d'emblée comme une évidence. L'objet même, au-delà de la musique enregistrée, porterait cette singularité puisque je me refuse d'habitude à acheter des nouveautés en vinyl. Qu'importait ce soir le scandale m'amenant à payer près du double du prix initial pour avoir Third dans sa version cartonnée et grand format. Le choisir, c'était tout à l'heure comme acquérir mon tout premier disque. L'émotion ressentie, souvent, en achetant le nouvel album d'un artiste aimé est différente. Ici - allons-y pour les superlatifs ! - je savais déjà que le disque était l'un des plus grands jamais enregistrés. Je n'ai pas fini de regretter la phrase précédente, mais peu importe : un blog se conjugue au présent.
Poser Third sur la platine, frissonner en entendant bruit de l'électricité statique au contact du saphir, c'était, pour le moins, lui donner dès ce soir sa vraie place : celle d'un authentique chef-d'oeuvre.

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26 avril 2008 6 26 /04 /avril /2008 12:50

Bourré à craquer le Trabendo pour le retour de dEUS à Paris. La polémique qui vient de Belgique quant à l’absurde embargo imposé aux journalistes par Universal, on s’en tape. L’un des meilleurs groupes du monde joue ce soir à Paris. Et les morceaux de Vantage Point, découverts depuis lundi, bourdonnent déjà dans mes oreilles, en rotation lourde. Evidents, savants, terriblement accrocheurs, ils prendront un relief prodigieux à l’épreuve de la scène : du tubesque The Architect jusqu’à l’ultime morceau de l’album, Popular Culture, joué en dernier pour le second rappel et rappelant enfin, après les explosions soniques et les arrangements tortueux, la douceur et la science mélodique de Little Arithmetics. Dans cette salle à la configuration si étrange, cerné par le public, Tom Barman semble s’amuser, se lâcher. C’est un bon soir. Le leader de dEUS est d’humeur dansante. Et Dieu sait si on l’a connu plus crispé.
Il apparaît assez évident que ce groupe enfin stabilisé, après de nombreux changements de personnel, n’a qu’un défaut tout relatif : celui de venir de Belgique. Si dEUS était un groupe anglais ou américain, gageons que ce ne serait pas au Trabendo qu’ils joueraient ce soir-là, mais juste à côté au Zénith… Ce n’est pas le cas. Tant mieux. A côté des nouveaux morceaux tous remarquables, le groupe aligne ses classiques avec autant de fougue que de classe : Fell off the Floor, Man, Instant Street et son irrésistible crescendo, Theme From Turnpike, For the Roses, Suds and Soda
Et les souvenirs de ce groupe-compagnon affluent en vrac. Douze ans dans mon rétroviseur intime. La découverte du groupe via un cd des Inrocks où explosait Fell off the Floor, Man (ce morceau, je crois que je ne m’en remettrai jamais) ; un show-case acoustique à la Fn*c Bastille ; les concerts de la fin des années 90 à la Cigale ou au Festival de Saint-Nolff, quand le beau Stef Kamil Carlens, parti depuis fonder Zita Swoon, faisait encore partie du line-up originel ; l’enchantement pop de The Ideal Crash ; le retour raté mais émouvant de la Route du rock 2004 ; la projection du long métrage d’un Tom Barman revenu au quasi-anonymat sous ses frusques de cinéaste au mk2 Beaubourg ; le concert de l’Olympia, Arno dans la salle, pour la sortie de Pocket Revolution ; celui de Paris-Plage il y a bientôt deux ans, où, divine surprise, SKC vint rejoindre Tom Barman pour enfin, frères ennemis réconciliés, rechanter avec lui Suds and Soda.
A voir le groupe jeudi soir, je me dis que la liste de ces bons souvenirs n'a pas fini de s’allonger.



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21 avril 2008 1 21 /04 /avril /2008 22:47

Hier soir, pendant tout le concert de Gogol Bordello, assurant la première partie de The Hives au Zénith, on pouvait lire ceci en lettres rouges défilant sur deux panneaux lumineux : "stage diving / slam interdit sous peine d’exclusion"
Ce n'est pas que votre serviteur soit un adepte de la chose, mais tout de même... Si le Zénith ne voulait pas qu'Iggy Pop ou Mathias Malzieu de Dionysos remettent les pieds sur sa scène, il ne fallait pas s'y prendre autrement. Et puis si on interdit désormais de slammer aux concerts de rock, on ouvre la voie à quoi ?


- Accès à la fosse interdit aux plus de trente ans
- Interdiction de se frayer un chemin dans la foule une fois le concert commencé
- Interdiction de déborder, en dansant, le périmètre autorisé à chaque spectateur
- Interdiction de décoller ses deux pieds du sol de manière simultanée

- Interdiction de chanter faux
- Interdiction de frapper dans les mains à contretemps
- Interdiction de siffler la première partie
- Interdiction de discuter au bar pendant les concerts
- Interdiction de photographier sous peine de confiscation de l’appareil
- Interdiction de renverser son gobelet de bière par terre
- Interdiction d’assister au concert sans bouchons d’oreilles
- Interdiction de pogoter
- Interdiction de porter un tee-shirt à l’effigie d’un autre groupe que celui à l'affiche
- Interdiction de se lever pour quiconque aurait une place assise (une tolérance sera éventuellement accordée pour le rappel)
- Interdiction de réclamer un second rappel
- Interdiction de stationner dans la salle plus de cinq minutes après la fin du concert

 

Comment ? Certaines propositions ci-dessus ont déjà été validées ? Ah bon ?

 

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14 avril 2008 1 14 /04 /avril /2008 23:29
Il y a une petite quinzaine d'années, autour de Beck, la pop se fit bricoleuse. Le folk venait chercher des poux dans la tête du funk, les samples et les machines s'incrustaient dans les studios au milieu des instruments vintage. Sur des structures volontiers décharnées, les apprentis-sorciers du Beta Band, les anglais de Cornershop se révélèrent, dans le sillage du blondinet californien, bidouilleurs de génie. Puis quelques tubes éphémères propulsèrent Eels, Badly Drawn Boy ou le momentanément mainstream Jude dans cette grande famille d'expérimentateurs. Certains n'ont enregistré que quelques albums (Cornershop), d'autres ont disparu (Jack, The Beta Band), d'autres poursuivent leur route, modestement, loin des lumières qui pavaient leur chemin à l'orée du 21e siècle (Eels, Jude) et les plus timides donnent trop rarement de leurs nouvelles (Baxter Dury, The Notwist). Déjà démodés, leurs collages pop, parfois éloignés de plusieurs années, participaient pourtant d'un même mouvement où l'érudition le disputait à la technique et à l'inventivité. On ne parlait pas encore de renaissance du rock. Mais la pop était belle à voir. Petite compil dans le rétroviseur, par ici... http://7and7is.muxtape.com/

Baxter Dury - Fungus Hedge
The Notwist - Neon Golden
The Beta Band - Dogs Got a Bone
Cornershop - Candy Man
Beck - Beercan
Jude - Rick James
Jack - Disco Cafe Society
Eels - That's Not Really Funny
Badly Drawn Boy - All Possibilities
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