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14 mai 2008 3 14 /05 /mai /2008 20:13


Le lieu portait le nom d’un mauvais album de Madonna. L’Erotika était logiquement situé à Pigalle, pas loin de l’Elysée Montmartre, de la Cigale, entre phosphorescents sex shops et minables échoppes. Déjà touristique, le quartier, sous les néons fluos. Mais bien moins qu’aujourd’hui, aseptisé, safe, nettoyé des filles et des travestis qui alors y faisaient tache…
Thomas, le chanteur de ce groupe de rock alternatif que tu aimais bien, venait de lancer un nouveau projet. Ce groupe, dont l’album avait été produit par le guitariste de FFF, devait jouer ce samedi-là à l’Erotika. Il s’y produisait assez régulièrement, avais-tu cru comprendre. Dans la semaine, parce que tu avais entendu parler d’invitations à récupérer sur radio 102.3, tu étais allé, un midi, chercher deux places pour le concert.


Ce samedi-là, donc, vous débarquiez à l’Erotika. Vous ne vous étiez pas renseignés. Vous ne saviez pas qu’il ne s’agissait pas vraiment d’une salle de concert. Il avait beau être près de minuit, la salle était vide. Les mecs en sapes chics et les nanas apprêtées qui arrivaient peu à peu ne laissaient planer aucune ambiguïté sur la nature du lieu. De toutes façons, peu de gens, à cette heure, étaient là pour le groupe. D'ailleurs, il était patent qu'il n'allait pas jouer tout suite...
Cela faisait un moment que tu n’étais pas rentré dans une discothèque. Une discothèque, vous auriez dû vous en douter. La musique, crois-tu te souvenir, était médiocre. Boire, il n’y avait que ça à faire. Les consos s'additionnaient encore en francs. Les gens dansaient mollement. L’ennui infusait lentement.

Puis vint l’heure du concert. Son dernier show. Mais, ça, tu ne le savais pas encore.
Sa prestation, tu ne t’en rappelles pas vraiment bien. Le groupe, livrant avec fougue son funk-rock en français, s’amusait, c'est sûr. Devant un public majoritairement indifférent, principalement impatient que les instruments dégagent et que le dancefloor s’électrise. Tu sais pourtant, sitôt les amplis éteints, que vous êtes partis. A l’époque, tu aimais bien moins danser qu’aujourd’hui.


Le surlendemain, un entrefilet dans un journal.
Le chanteur était tombé du toit.
Après le concert, il avait entrepris l’escalade de la façade de l’immeuble. Perché une fois de trop.
Et pendant que tu rentrais, que tu te couchais, que tu t’endormais, à seulement quelques centaines de mètres de toi, il avait glissé.

On l’a un peu oublié aujourd’hui. Les disques de ses deux groupes ne traînent sans doute même plus dans les bacs à soldes. Toi, tu aimes bien, pourtant, les réécouter parfois. Des échos, des larsens d'adolescence...
C’est en recherchant il y a peu les accords de La mouche, chanson qu’il avait reprise en guise de clin d’œil avec son premier groupe - le plus connu - que tu avais incidemment repensé à lui, à cette soirée parisienne lointaine et floue, à cette énième tragédie rock à la con…

 

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commentaires

M
<br /> <br /> Coucou à tous les gars, j'étais le bassiste de Thomas à cette fameuse soirée, et je suis très touché de lire tous vos commentaires après tant d'années!!! Merci beaucoup. Bruno<br /> <br /> <br /> <br />
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S
<br /> Ce soir là nous étions tous là pour voir toma. Surtout que le vendredi précédent Tomawak avait fini son concert avec un invité surprise : Axel Bauer avec sa guitare. Le groupe remettait cela ce<br /> soir là avec Axel à la six cordes, sa belle en corégraphie, Toma à fond sur son micro pour plus d'une heure de concert avec tout le band dérrière. Un live parfait, un son nikel, précis. Le public<br /> était heureux et nombreux, rien ne laissait présager une fin tragique avant l'aube. Le concert fini, Toma annonce son prochain concert sur le camion Jam Fusion à Odéon à l'occasion de la fête de la<br /> musique la semaine suivante. Nous l'abordons à sa descente de scène avec Axel qui nous confirme sa présence dans le groupe pour le concert du 21 juin. Nous buvons au bar tous ensemble, thoma<br /> disparait dans la loge avec le groupe et ses jolies manageuses. La soirée est cool presque trop magique à la veille de l'été 96. Le live a laissé place au dance floor qui se rempli. L'Erotica est à<br /> la veille de sa fermeture administrative, mais l'Erotica est presque plein ce soir. Tomawak s'y produit depuis plusieurs semaines chaque vendredi soir, des concerts de soutient, des concerts pour<br /> que ce lieu mythic de la nuit parisienne raisonne encore. Toma aimait l'Erotica. Puis le revoila parmis nous, il dance sur la piste au milieu des gens, mais dans un mouvement d'humeur toma eclate<br /> sa bière sur le dance floor, il est furieux. En fait il vient de se prendre la tête avec le boss de la boite sur la recette du soir, un partage pas équitable semble-t'il. Toma veut comme toujours<br /> défier les forces contraires, toma n'a jamais peur de rien, toma escalade la façade de l'immeuble désafecté. Les gens sortent pour le regarder, toma grimpe encore comme il a tant fait sur toutes<br /> les façades de france et de navare, toma est agile mais furieux, toma en veut a la terre entière, à ce monde pourri. Ce monde si bas ne mérite pas toma, cet ange d'amour et de beauté, toma grimpe<br /> toujours mais dérape. La chute est fatale, la foule vient de perdre son héro du soir. Toma aimait tout le monde et tout le monde l'aimait. Il nous laisse un souvenir en video, alors jetez vous sur<br /> http://video.mytaratata.com/video/iLyROoaft-Eh.html, j'ai beau chercher, c'est tout ce que j'ai trouvé mais c'est déjà beaucoup, la mémoire d'une étoile filante.<br /> <br /> <br />
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L
Un bel hommage pour ce chanteur que j'adorais. L'album de Tomawak est vraiment bien avec un gros coup de coeur pour la chanson pourquoi?Meme si la mouche a arrêté de crier, on sera toujours là pour dire que nous aussi on aime les escalators et on les adore!
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T
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D
Moi aussi, cela fait partie de mes lacunes... Mais le texte m'a cueilli... A part un détail qui m'aurait attiré toutes les huées (heureusement que je passe plus tard, les tiennes me suffiront...) : je suis un inconditionnel de Madonna. Et ne me réponds pas  : personne n'est parfait. S'il te plaît :-)
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