29 septembre 2006
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Walkie Talkie Man de Michel Gondry
Il y a quelque temps - avant de se perdre dans son imaginaire et dans ses marottes regressives (décidément, je ne peux m'empêcher de préciser à nouveau à quel point je n'aime pas La science des rêves) - Michel Gondry enthousiasmait en proposant à chaque nouveau clip un nouveau concept. Chose encore vérifiable il y a deux ans avec cette vidéo réalisée pour un obscur groupe néo-zélandais dont le principal fait d'armes fut d'avoir son morceau popularisé par une publicité pour I-Tunes.
Si l’on pense un peu en voyant ces images aux musiciens de Supergrass transformés en poupées de chiffons pour le jubilatoire Pumping on Your Stereo réalisé par Garth Jennings, ce clip se double à mes yeux d’une critique implicite de l’industrie musicale. Dans ces trois minutes de fureur tricotées par Gondry, les jeunes rockers de Steriogram – surlookés, sur-produits, vaguement crétins – s’apparentent bel et bien à des pantins, à des marionnettes dont les fils seraient tirés par d’autres : par des producteurs malins postés derrière leur console et, plus encore, par le réalisateur lui-même. Car dans Walkie Talkie Man – entre un clin d’œil à King Kong et un autre à Bolide (l’un de ses premiers clips) – Gondry apparaît pour la première fois dans son propre rôle.
Tandis que les musiciens grattent leurs molles guitares dans un studio d’enregistrement tenant lieu de décor au tournage de la vidéo, il y a derrière cette apparition quelque chose qui nous parle de la construction d’un groupe par l'image. Deux ans plus tard, on ne sait d'ailleurs plus qui est Steriogram mais on se souvient assurément de ce clip.
Un temps boudé par l’industrie musicale, le clip retrouvait là sa fonction toute-puissante de modelage avec un Gondry prenant l’ascendant sur des musiciens ne se rendant sans doute pas compte du mauvais tour qu’on leur jouait (à l'inverse, si l’on parle encore de Fell in Love with a Girl comme du clip en Légo du réalisateur, ce n’est jamais au détriment des White Stripes qui avaient, eux, l’avantage d’être connus bien avant qu’il les filme). Steriogram fut donc le groupe d’un seul single. Et cette entrée en matière impressionnante servit finalement plus la cause du clip et du cinéma que celle d’un groupe d'emblée pressenti médiocre.
Filmant à sa manière la naissance d’un tube dans une vidéo dont le ludisme auto-célébratif consacrait rien moins que l’étendue de son talent, Gondry apparaissait bel et bien là tel le premier réalisateur-star de l’histoire du clip.
NB : Dans cette façon de "signer" un clip et d'affirmer la place souveraine du réalisateur, on peut penser aussi à la démarche d'un Roman Coppola lorsqu'il réalisa Funky Squaredance pour Phoenix (voir ici).