Sur ce blog, j'utilise abondamment les ressources fournies par YouTube ou Dailymotion. La possiblité d'intégrer des vidéos fut même l'un des déclics qui mena à la création de 7and7is car elle me permettait à la fois de composer une sorte de playlist idéale et de montrer les clips sur lesquels j'écrivais par ailleurs depuis quelque temps.
Pourtant YouTube me fait peur. Proliférant, YouTube est le symptôme le plus récent de ce qu'est l'Internet depuis plusieurs années : un puits sans fond où tout se vaut, où tout est mis sur le même plan et où les hiérarchies ne se font plus aussi naturellement qu'avant.
Avec YouTube, ce que l'on appelait le Cinéma est attaqué dans son intégrité. La notion s'étiole. Sur YouTube, on découpe les longs métrages en plusieurs parties, on voit des publicités cotoyer des clips et des clips cotoyer des courts métrages. Tout se mêle. Bientôt, Cosmos 1999 sera plus connu grâce aux détournements de Mozinor que grâce à ses diffusions télévisées.
Finalement, à quoi bon aujourd'hui, pour les professionnels, produire des films quand tant d'images sont là à portée de main ? À quoi bon, pour l'industrie du disque, réaliser des clips quand le moindre internaute peut faire son propre montage à partir de sa chanson favorite ?
Grâce à YouTube aussi, n'importe qui peut devenir une star éphémère. La prophétie Warholienne devient triste banalité et un imitateur amateur se retrouve souvent plus vu que la personne qu'il imite. Ainsi, il y a quelques jours, sur la page d'accueil de YouTube, ce qui était mis en avant c'était un type qui imitait Borat, le faux journaliste au succès tout récent. Il n'y a pas vraiment de quoi se réjouir. Dans le même ordre d'idées, tapez Led Zeppelin sur le moteur de recherche de YouTube et vous vous retrouverez avec des dizaines de guitaristes du dimanche se filmant en train d'essayer de reproduire les solos de Jimmy Page... Passionnant...
Mais YouTube est aussi une source inépuisable de surprises, l'occasion de découvrir des choses que l'on n'avait jamais vues. Comme les blogs mp3, comme le téléchargement, YouTube est précieux pour les amateurs de musique et de rock. Plus que l'outil permettant à chacun de se mettre en scène, YouTube est passionnant dans les possibilités d'archivage qu'il offre.
On ne remerciera jamais assez les internautes qui numérisent telle ou telle émission, tel ou tel passage permettant par exemple de voir PJ Harvey et Bjork reprendre ensemble Satisfaction. Et, à côté de ces moments précieux, que penser des dérives pénibles comme ces innombrables captations tremblotantes enregistrées pendant un concert à l'aide d'un pauvre téléphone portable ?
NB : À propos de YouTube, le magazine Court-Circuit d'Arte a diffusé un chouette sujet il y a quelques semaines (voir ci-dessous). Mise en abyme vertigineuse, on peut, grâce à un anonyme internaute, visionner ce sujet concernant YouTube, sur son ordinateur...
NB 2 : De Court-Circuit (le magazine), on rappellera aussi que c'était la seule vraie émission de cinéma sur les chaînes hertziennes. Une émission qui refusait la promo (passage obligé d'autres émissions prétendant parler de cinéma) pour privilégier l'analyse et la critique. Un espace ouvert et passionnant où le Cinéma était abordé sous toutes ses formes, où un cinéaste expérimental pouvait cotoyer De Palma et où le cinéma de Laurent Achard était traité avec le même intérêt que les clips de Michael Jackson.
Durant six ans, on y vit des sujets et des analyses passionnantes grâce à un rédacteur en chef curieux qui aujourd'hui s'en va contraint, Arte préférant orienter l'émission vers un magazine multimédia qui sera la vitrine d'un site internet en développement. S'il y aura toujours des films courts sur Arte, l'oeil de Luc Lagier manque déjà. Son dernier numéro en tant que rédacteur en chef sera diffusé mercredi prochain aux alentours de minuit, avec un sujet sur la série Mission : Impossible.