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Charlotte/Carlotta



Pouvait-elle seulement se planter ? Air aux compositions et aux instruments, Jarvis Cocker (Pulp) et Neil Hannon (Divine Comedy) aux textes, David Campbell (le papa de Beck !) aux arrangements de cordes et Nigel Godrich à la production. Le casting était énorme, on n'avait plus qu'à rêver...

Au final, le tout est incroyablement cohérent, parsemé d'hommages décomplexés à Serge Gainsbourg (un riff évoquant celui de Bonnie and Clyde, des basses rondes et étouffées à la Melody Nelson). Mais c'est aussi le problème de l'album - le seul - d'être trop évidemment "sous influence". D'ailleurs, David Campbell n'avait-il pas déjà explicitement cité les arrangements de cordes de Jean-Claude Vannier pour Melody Nelson sur le Paper Tiger de son fiston ?

Plusieurs écoutes depuis lundi : le disque est formidable et en même temps il est presque trop parfait, presque trop conforme aux attentes, laissant un drôle de bourdonnement dans les oreilles. L'impression, surtout, c'est celle d'une réification iconique de la chanteuse. Comme si la fine-fleur de la pop s'était emparée de Charlotte - avec son consentement - pour assouvir un fantasme gainsbourien autour duquel certains (Air, Cocker) tournaient déjà depuis quelques temps. Vu sous cet angle, l'apparemment lisse 5:55 est un disque très étrange et, finalement, plus dérangeant que Charlotte Forever il y a 20 ans.

Vrai-faux nouvel album de Air, 5:55 serait-il alors le vrai album-hommage à Gainsbourg avec, dans le rôle principal, la diaphane Charlotte pour remplacer Jane B. dans une entreprise aux volutes mortifères ?

Scotty Fergusson, dans Vertigo, transformait Judy en nouvelle incarnation d'une morte, la revêtait d'atours portés par la défunte Madeleine pour lui donner l'identité (l'image) d'un fantasme. Jane B., heureusement, n'est pas morte. Eprise de modernité, elle multiplie même, depuis deux disques, des collaborations (Beth Gibbons, Miossec, Dominique A, Brian Molko, Mickey 3D) lui permettant de s'affranchir enfin des chansons que lui écrivit Serge et, surtout, d'en chanter de nouvelles.

Nicolas Godin et Jean-Benoît Dunckel de Air campent au contraire délibérément dans le passé, s'emparant du patronyme de Charlotte avec une gourmandise non-feinte. Avec 5:55, ils ont façonné la fille en égérie pop et l'ont habillée de mélodies qu'aurait pu chanter sa mère. 35 ans auparavant... Une histoire de double, donc, comme dans Vertigo... On ne s'étonnera pas, alors, que Morning Song, la chanson sur laquelle se clôt l'album, évoque le souvenir d'un fantôme...
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S
Je ne sais pas. Est-ce qu'on ne fait pas ce procès à Charlotte Gainsbourg à cause de son nom et de la promo énorme qui a accompagné la sortie de l'album ? Nombreux sont ceux qui, aujourd'hui, revendiquent les influences de Gainsbourg et on ne le leur reproche pas comme à elle.  Et puis, dans le rock actuel, on a quand même essentiellement des gens qui, pour reprendre tes termes, essayent de "ressusciter un passé glorieux", il ne faut pas l'oublier...Mais il est évident qu'elle devrait éviter de faire du Gainsbourg et travailler avec des gens qui ne nourrissent pas un tel culte envers son père. Comme je te le disais hier, ce disque m'intéresse surtout par le paradoxe de l'échec qu'il raconte.
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A
Il est très agréable de se ressusciter un passé glorieux, certes... Mais... Et le futur dans tout ça ???
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M
Bon j'avoue je ne l'ai pas beaucoup écouté (une fois pour être franc). Mais cette première écoute m'a laissé de glace. Limite j'me suis ennuyé. Ca a l'air d'être un bon disque pour dormir. Mais la critique me donne envie de retenter l'écoute.
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