Alors, comme ça, Bruce, tu as fait un film ? Tu as donc coréalisé un court métrage ? Avec Thom Zimmy qui signa, pour toi, quelques beaux documentaires ?
Bon, comment te dire, on a regardé... On a tenu les dix minutes. Oui. Et, bon, c’est un clip, ton truc. Un pas très bon d’ailleurs. Comme d’habitude en fait...
Bruce, je t’explique. Ce n’est pas parce que tu gratifies ton morceau d’une intro vaguement narrative de cinq minutes que ça fait un film, tu sais. Surtout, si c’est pour, après, te vautrer dans le tout-venant de la vidéo musicale avec la chanson qui déroule, des plans de toi qui chante face caméra avec, montée en parallèle, une très vague (et très soft) fiction post-apocalyptique dont on peine à saisir le sens et l’enjeu. Sinon, c’est sûr, les images sont jolies. Jolis effets de flare (c’est à la mode), jolis plans de nature (c’est facile, ça mange pas de pain) et puis, ah oui faut que je t’en parle, des flashbacks au ralenti... Voilà, voilà… Tu sais que c’est interdit depuis les années 80, ça, les flashbacks au ralenti dans les vidéos musicales ?! Sur des enfants qui jouent qui plus est ! J’imagine que c’est Thom Zimmy qui a réussi à te dissuader de passer ces séquences en sépia, c’est déjà ça… Tu me diras, tu boucles la boucle : après avoir intitulé un de tes hymnes Badlands, tu rends là, par l’image, hommage à Terrence Malick. Hunter of Invisible Game, finalement, c’est un peu ton mash-up de La route et de Tree of Life. En moins bien, quoi…
On savait déjà que tu n’étais pas un très bon acteur, on sait maintenant – mais on s’en doutait – que tu n’es pas un très bon réalisateur. C’est ton premier film, on ne t’en veut même pas, et quelque chose me dit que ce sera le seul. Comme une récréation après une tournée marathon, et tu as bien le droit. D’essayer des choses, d'explorer d’autres moyens d’expression (ton roman, quand ?). Mais tes scénarios, à l’avenir, fais-en plutôt des chansons (jusque-là, ça t’avait plutôt bien réussi).